La France joue sur la crise sanitaire pour attirer les étudiants étrangers
En continuant à accueillir des étudiants étrangers quand d’autres pays se sont fermés, la France a tiré de la crise sanitaire « un avantage comparatif », estime l’agence Campus France, qui a publié jeudi ses chiffres annuels.
L’embellie avec la pandémie. « En termes d’attractivité des étudiants internationaux, la crise sanitaire profite à la France », assure Béatrice Khaiat, la directrice générale de Campus France, l’agence de promotion à l’étranger de l’enseignement supérieur dans l’Hexagone.
En 2020, les frontières se sont fermées, avec un étudiant sur quatre qui ne pouvait plus se rendre dans l’établissement où il était inscrit dans l’Hexagone. Mais « la France est l’un des seuls pays au monde à avoir continué à attirer les étudiants étrangers », souligne Béatrice Khaiat en évoquant une politique favorable aux visas étudiants.
Les chiffres annuels que Campus France a publiés jeudi montrent ainsi qu’en 2020, la France a limité la baisse des primo-arrivants à 25 %, là où d’autres pays ont enregistré des chutes beaucoup plus fortes (-43 % aux Etats-Unis ou -63 % en Australie).
En 2020, le nombre de dossiers de candidatures était en augmentation en provenance de toutes les zones, hormis l’Asie et l’Océanie (-16 % en un an). En termes d’effectifs, les demandes les plus nombreuses sont venues d’Afrique subsaharienne.
Avant crise, l’Hexagone a régressé
Ce qui s’apparente, selon Béatrice Khaiat, à « un avantage comparatif » permettra-t-il à la France de regagner les places perdues avant la pandémie ? Car d’autres chiffres, ceux de l’Unesco, qui paraissent tous les deux ans, montrent la réalité d’avant la crise : celui d’un décrochage de la France pour la deuxième année consécutive. Dans le concert des pays qui attirent le plus les étudiants internationaux, la France occupe désormais la 6e place, derrière l’Allemagne et la Russie.
Selon Campus France, le recul est lié à la nouvelle méthodologie du ministère de l’Enseignement supérieur, qui ne comptabilise plus que les mobilités diplômantes, mais aussi au fait que la France progresse moins vite que la moyenne mondiale (l’écart est de 3 %) et que ses propres concurrents.
Le regain d’attractivité qu’entrevoit Béatrice Khaiat ne se lira dans les chiffres de l’Unesco que dans deux ans, regrette-t-elle. En attendant, elle scrute un paysage dont « les cartes vont être complètement rebattues » par la crise. Les très grands pourvoyeurs d’étudiants étrangers étaient jusqu’ici la Chine et l’Inde. La Chine « n’a pas envoyé ni reçu d’étudiants étrangers », mais la France y est « moins dépendante » que les universités anglo-saxonnes. L’Inde « n’a pas assez d’établissements sur son territoire et devrait continuer à envoyer des étudiants à l’étranger ». « S’il y a un pays qui va bien s’en sortir, c’est l’Allemagne, c’est notre vrai concurrent », estime-t-elle encore. Même si elle a demandé aux étudiants étrangers de différer leur venue, « l’Allemagne a maintenu des bourses en ligne, a complètement investi dans les formations en anglais, et la vie y est moins chère qu’en France ». Outre-Rhin, ce sont ainsi 61.000 bourses d’études qui sont accordées pour des mobilités entrantes, dont 17.000 bourses de longue durée, parfois pour tout un cycle, précise Béatrice Khaiat : « C’est au moins sept fois plus qu’en France ! » En Allemagne, un étudiant étranger peut se voir octroyer une bourse de cinq ans pour un cycle de doctorat. En France, la plupart des bourses de longue durée courent sur une durée de six mois à un an tout au plus.
« Notre force, c’est l’Afrique »
Au regard des derniers chiffres, la directrice générale de Campus France voit l’Afrique comme « notre force ». Sur les 370.052 étudiants étrangers accueillis en France en 2019-2020, le poids de l’Afrique subsaharienne s’est accru (23 % contre 20 % en 2014). En 2019-2020, 51 % des étudiants étrangers inscrits en France étaient originaires d’Afrique ou du Moyen-Orient (+33 % en cinq ans), 25 % d’Europe (+17 %), 15 % d’Asie ou d’Océanie (+11 %) et 9 % des Amériques (+21 %).
(Source Les Echos – Mars 2021)